Menu Fermer

Les objets variables et transitoires jouent depuis longtemps un rôle majeur dans l’astronomie comme l’attestent notamment les observations des astronomes chinois reportées il y a 4000 ans (Lire à ce sujet le sujet « Regard sur le passé : Ciel immuable et ciel transitoire »). Comètes, novae, étoiles variables, supernovae, sursauts gamma ou fusions d’objets compacts à l’origine de l’émission d’ondes gravitationnelles sont parmi les objets de ce ciel variable et transitoire, bien loin de la représentation classique d’un ciel immuable, statique.
L’essor et l’intérêt porté à l’observation du ciel transitoire sont intimement liés aux développements et progrès technologiques des outils de détection : capteurs plus sensibles donc des temps de pose plus courts, accès à des domaines de longueurs d’onde nouveaux, puissance accrue des moyens de stockage et de traitement de l’information, avènement de caméras grand champs montées sur des télescopes de plus en plus grands ou bien encore efficacité et interaction avec les alertes données par les outils du domaine émergeant des messagers non électromagnétiques.

Les objets du ciel variable et du ciel transitoire

La différence entre objet variable et objet transitoire peut se définir en partie sur le caractère largement imprédictible du phénomène et du point de vue observationnel sur la limite de détection de l’instrument, un objet variable restant à tout moment détectable tandis qu’une source transitoire tombe sous le seuil de détection. Dans les deux cas les échelles temporelles de variation peuvent être diverses. Un autre aspect marquant la différence entre les deux catégories relève de l’impact de la variabilité sur la nature même de l’objet. Une source peut être variable non par un changement intrinsèque de sa composition mais par un effet externe comme le transit d’une planète devant une étoile qui modifie pour l’observateur la luminosité de l’astre visé. Dans le cas d’une source transitoire, le changement d’état est suivi d’une transformation physique profonde du système causant dans certains cas (sursauts gamma ou supernova) la disparition de l’étoile hôte. L’étude du ciel transitoire permet ainsi de mieux comprendre des phénomènes comme les processus d’accrétion de matière dans les systèmes binaires, les éjections sous forme de jets dans les sursauts gamma, le comportement d’un plasma en présence de champs magnétique et gravitationnel intenses ou bien encore la fusion de deux astres compacts. Les objets transitoires peuvent appartenir à la Voie lactée ou être situés à des distances bien plus considérables comme les noyaux actifs de galaxies. Ils sont observés aujourd’hui à diverses longueurs d’onde.

La vidéo ci-dessus illustre le caractère extrêmement changeant du ciel lorsqu’observé dans certaines longueurs d’onde. La séquence résulte de l’observation continue de la voûte céleste (représenté ici en coordonnées galactiques) par l’instrument ASM de la mission spatiale RXTE dans le domaine des rayons X (entre 5 et 12 keV) durant la période 1996-1999, soit 4 années de données. Des sources apparaissent soudainement ou changent subitement d’éclat. Elles sont principalement réparties le long du plan galactique (figure en bas) et pour les plus remarquables leur identification est indiquée. Crédit : http://xte.mit.edu/.

Le ciel transitoire et la mission SVOM : stratégie et programme d’observation

Si le cœur de la mission SVOM est de garantir l’observation d’environ cent sursauts gamma par an, c’est aussi un formidable outil destiné à sonder le ciel transitoire. Pour observer des phénomènes se produisant sur de courtes échelles de temps (parfois inférieure à la seconde), d’importants dispositifs de détection et de suivi sont nécessaires. Comme sa mission sœur SWIFT, développée par la NASA, la mission SVOM laisse dans son programme d’observation une place importante pour la science hors sursaut. SVOM sera en mesure de déclencher une alerte suite à la détection d’un phénomène transitoire et ce grâce en particulier à ses instruments grand champs Eclairs et GRM. Réciproquement, la mission pourra réagir à des alertes (des cibles d’opportunité, ToO) générées par d’autres observatoires du ciel transitoire, au sol ou dans l’espace, et pointer alors ses instruments vers l’objet. SVOM sera ainsi un partenaire de choix pour d’autres programmes d’observation notamment dédié à l’étude du ciel transitoire, comme par exemple le projet LSST dans le domaine visible ou par le réseau SKA dans les ondes radio.

Astronomie multi-messagers

La mission sera également à même de répondre rapidement aux alertes fournies par les télescopes à neutrinos IceCube ou KM3N ou par celles délivrées par les interféromètres d’ondes gravitationnelles LIGO et Virgo.

L’objectif initial de la mission, l’étude des sursauts gamma, pourra ainsi s’étendre à celle des ondes gravitationnelles. Prédites depuis Einstein et la théorie de la relativité générale, ces oscillations de la courbure de l’espace-temps sont devenues réalité après l’annonce le 11 février 2016 de leur découverte par la collaboration LIGO/Virgo, couronnant des années de recherche et de développements technologiques. Le signal détecté le 14 septembre 2015 par les deux interféromètres du projet LIGO est interprété comme la signature des tout derniers instants de la fusion de deux trous noirs de chacun trente masses solaires. Ce même réseau d’interféromètres détecte le 17 août 2017 un autre évènement mais qui cette fois est accompagné d’une brève émission gamma capté par les satellites haute énergie Integral de l’ESA et Fermi de la NASA. Ici, le phénomène observé à la fois sous forme d’ondes gravitationnelles et électromagnétiques correspond à la fusion de deux étoiles à neutron, hypothèse longtemps avancée pour expliquer les sursauts gamma courts.

Ces découvertes majeures valident le scénario de coalescence de deux objets compacts (étoile à neutron et/ou trou noir) comme source d’émission d’ondes gravitationnelles et ouvrent de nouveaux horizons par exemple leur utilisation comme potentielle sonde cosmologique.

L’astronomie des neutrinos est autre domaine multi-messager où la mission SVOM peut apporter une contribution significative en recherchant dans ce cas la contrepartie électromagnétique du signal neutrino, premier pas vers l’identification des sources.

Les défis du domaine temporel

L’étude du ciel transitoire est une branche de l’astronomie en pleine essor et de nombreux observatoires aujourd’hui en développement et dédiés à cette thématique verront le jour à l’horizon 2020. Devant ce panorama, la communauté scientifique fait face à de nombreux défis. Le principal enjeu est le traitement de l’information en temps réel pour détecter au plus vite les phénomènes transitoires et diffuser les alertes de manière efficace. La masse conséquente de données et le nombre d’acteurs nécessitent également une organisation spécifique pour assurer efficacement la diffusion et le suivi des alertes, tâche et défi que les scientifiques du projet préparent activement.
Le programme d’observation de SVOM sera constitué à 25% pour la recherche des sursauts gamma, tandis que 15% seront dévolus aux phénomènes transitoires (hors sursaut) les deux premières années pour atteindre 40% la troisième année.

Related Posts