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La mission SVOM (Space-based multi-band astronomical Variable Objects Monitor) est une mission franco-chinoise consacrée à l’étude des plus lointaines explosions d’étoiles, les sursauts gamma. Elle a été lancée le 22 juin 2024 par la fusée chinoise Longue Marche 2C depuis la  base de lancement de Xichang.
Elle est le fruit d’une collaboration des deux agences spatiales nationales, CNSA (China National Space Administration) et CNES (Centre national d’études spatiales) avec les contributions principales des laboratoires de l’Institut de recherche sur les lois fondamentales de l’univers (Irfu) et de l’Institut de recherche en astrophysique et planétologie (IRAP) pour la France et de  l’Observatoire Astronomique National (NAO) et l’Institut de Hautes Energies de Pékin (IHEP) pour la Chine.

Les instruments SVOM (Espace et Sol)
Les instruments SVOM (Espace et Sol)

La mission comporte 4 instruments principaux dont 2 sont français (ECLAIRs et MXT) et 2 sont chinois (GRM et VT) :
le télescope ECLAIRs pour détecter et localiser les sursauts gamma dans la bande des rayons X et des rayons gamma de basse énergie (de 4 à 250 keV).
le télescope MXT (Microchannel X-ray Telescope) pour l’observation du sursaut gamma dans le domaine des rayons X mous (de 0.2 à 10keV)
le détecteur de sursaut gamma GRM (Gamma Ray Burst Monitor) pour mesurer le spectre des sursauts à haute énergie (de 15 keV à 5000 keV).
le télescope VT (Visible Télescope) opérant dans le domaine visible pour détecter et observer l’émission visible, produite immédiatement après un sursaut gamma.
Le satellite pèse un poids total de 930 kg pour une charge utile de 450 kg. Il sera placé sur une orbite terrestre basse avec une inclinaison de 30 degrés, une altitude de 625 km et une période orbitale de 96 min.

Les observations depuis l’espace seront complétées par un important segment sol comportant :
la caméra à grand champ GWAC (Ground-based Wide Angle Camera) pour étudier depuis le sol dans le domaine visible, l’émission prompte d’une partie des sursauts détectés
Les télescopes robotiques GFT (Ground Follow-up Telescope) pour mesurer avec précision les coordonnées  du sursaut gamma.

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Les instruments de SVOM (modèle de qualification du satellite, décembre 2019). SECM/CNES/CEA
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Le modèle de qualification du satellite SVOM en intégration à Shanghai, décembre 2019, crédit SECM.
Le modèle de qualification du satellite SVOM à Shanghai pendant les essais en vide thermique, octobre 2019, crédit SECM.
Le modèle de qualification du satellite SVOM à Shanghai pendant les essais en vide thermique, octobre 2019, crédit SECM.
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L’objectif principal de la mission SVOM est l’étude des sursauts gamma, un phénomène transitoire avec pour signature un flash intense de rayonnement gamma. Ces phénomènes sont les plus lumineux jamais observés depuis le Big Bang. Ils sont imprévisibles, éphémères et d’origine encore incertaine. Quelle physique cachent-ils ? Sont-ils les messagers des premières étoiles de l’Univers ? Permettent-ils de sonder le passé ?

Une course contre la montre

L’étude scientifique des sursauts gamma doit répondre à des contraintes de taille. Il faut dans un premier temps repérer le flash gamma. Celui-ci peut apparaître n’importe où sur la voûte céleste et il ne dure que quelques secondes. Qui plus est, ce type de rayonnement est arrêté par l’atmosphère de la Terre !

La détection doit donc avoir lieu dans l’espace. Les instruments, installés sur le satellite SVOM, ont donc pour tâche de récolter des données à bord qui seront transmises sur Terre en un minimum de temps grâce à un réseau d’antennes relais. L’enjeu majeur de la mission est de pouvoir déterminer l’origine du sursaut gamma : d’où vient-il ? A quelle période a-t-il été créé ? Seule l’analyse spectrale de la lumière permettra de répondre à cette dernière questions, analyse qui sera réalisée par les grands télescopes terrestres à partir de rayonnements dans de visible et l’infra-rouge consécutifs aux ondes gamma.

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L'analyse conjointe de la lumière récoltée par les instruments au sol et dans l'espace, permettra de déterminer l'origine du sursaut.
L’analyse conjointe de la lumière récoltée par les instruments au sol et dans l’espace, permettra de déterminer l’origine du sursaut.

Les observations coordonnées à différentes longueurs d’onde sont donc la clé pour comprendre ce phénomène astronomique. La mission SVOM devra fournir une localisation suffisamment précise du sursaut pour que, depuis la Terre, il soit possible de l’observer alors que l’explosion initiale perd en énergie et en intensité.

Des témoins du passé

Scruté sous toutes ses coutures, le sursaut gamma ne sera plus vu comme un simple objet mystérieux, mais plutôt comme un formidable révélateur de l’inconnu. Il pourra donner des informations sur les conditions de sa formation et permettra de comprendre un peu mieux l’astrophysique de l’extrême. Témoin d’un passé révolu, il donnera des indications quant à son milieu d’origine mais également sur toutes les zones éclairées par cette lumière lointaine.

Opportunité pour l’étude du ciel transitoire

Grâce à la remarquable combinaison d’instruments déployés, tant au sol qu’à bord du satellite, SVOM est également dédiée à la science hors sursaut. Des équipes de recherche du monde entier pourront mettre à profit cette technologie automatisée pour observer des phénomènes cosmiques transitoires, c’est-à-dire des objets éphémères ou dont la luminosité varie dans le temps, tels les supernovæ ou les sources d’ondes gravitationnelles. Cette forte implication dans l’observation du ciel transitoire fera de la mission SVOM un partenaire incontournable pour l’ensemble de la communauté scientifique.

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La découverte des sursauts gamma est récente. La toute première détection de ce phénomène fut réalisée par un des satellites militaires du projet Vela, débuté en 1963. En ces temps de guerre froide, les États-Unis et l’URSS guettaient le moindre acte de belligérance, et notamment les traces d’essais nucléaires. Malgré la signature d’un traité portant sur l’interdiction des tests atomiques dans l’atmosphère et dans l’espace (signé en août de la même année), l’armée américaine lança une mission de reconnaissance destinée à repérer de telles traces. A bord des satellites Vela se trouvaient des détecteurs de rayons gamma, X et neutrons. Le 2 juillet 1967, les capteurs s’affolent, une émission très brève est détectée. Après vérification, il apparût clairement que ce rayonnement gamma n’était pas d’origine humaine, ni même terrestre. Mais il aura fallu attendre 1973 pour que soit rendue publique cette découverte, une fois la confidentialité militaire levée. Les sursauts gamma suscitèrent très vite la curiosité de la communauté scientifique. Les questionnements étaient nombreux. De quelle source proviennent de tels flashs de lumière ? Par quel(s) mécanisme(s) ? Apparaissent-ils dans notre galaxie, la Voie lactée, ou dans des galaxies plus lointaines, ce qui impliquerait une énergie encore plus colossale ?

La carte des sursauts

A partir de 1991, la NASA put récolter des informations cruciales grâce à l’observatoire spatial COMPTON, satellite géant sur lequel se trouvait l’instrument BATSE (Burst And Transient Source Experiment). Cette mission révéla que les sursauts gamma se répartissent en deux groupes distincts : * des sursauts courts (environ 30% des sursauts détectés) dont l’énergie caractéristique est élevée (environ 1000 keV). Leur durée est inférieure à 2 secondes * des sursauts longs (70%) avec une énergie caractéristique plus basse (de l’ordre de 100 keV) et dont la durée peut atteindre quelques dizaines de minutes. L’expérience BATSE a permis la détection de plus de 2500 sursauts gamma entre 1991 et 2000 et une carte du ciel a été établie. Mais faute d’une localisation précise, quelques degrés carrés, il n’a pas été possible d’identifier les sursauts avec des sources célestes.

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Chaque point sur cette carte du ciel représentée en coordonnées galactiques est un sursaut gamma détecté par BATSE. La couleur correspond à l’énergie totale perçue. BATSE a détecté 2704 sursauts gamma entre 1991 et 2000. Dans le système de coordonnées de cette carte, le centre de la Voie lactée est situé au centre. Crédits : NASA

Cette répartition est “isotrope” : les sursauts sont présents aléatoirement sur la carte indiquant soit une origine très proche de la Terre, soit une origine plus lointaine, extragalactique. Aucune concentration de sursauts le long du plan de la Voie lactée, symbolisé sur la carte par la ligne centrale horizontale, n’apparaît. Ceci exclut très probablement des candidats appartenant à notre galaxie.

Augmenter le champ d’étude et déchiffrer le lointain

Pour cerner l’origine des sursauts gamma, il devenait indispensable de les localiser précisément afin pouvoir mesurer leur distance. En avril 1996 fut lancé le satellite italien BeppoSAX. Le 27 février 1997, les instruments à bord du satellite BeppoSAX détectèrent et localisèrent le sursaut GRB970228. La localisation précise du sursaut en rayons X, rapidement transmise au sol, permit alors de pointer en direction de la source de puissants télescopes terrestres situés à La Palma en Espagne. Un signal faible et décroissant fut détecté. C’est ainsi qu’a été mise au jour l’existence d’une émission rémanente. Ce sont des rayonnements tardifs et plus ténus dans le domaine des rayons X, de la lumière visible et des ondes radio. Cette découverte est fondamentale : alors que les rayons X et gamma ne sont observables que depuis l’espace, ces autres types de rayonnement permettent en partie un suivi depuis la Terre ! De quoi ouvrir un nouvel axe de recherche à l’étude des sursauts gamma.

Emission rémanente du sursaut GRB970228 captée dans les rayons X : le phénomène va en s’atténuant avec le temps. crédits : NASA ASI/BeppoSAX
Emission rémanente du sursaut GRB970228 captée dans les rayons X : le phénomène va en s’atténuant avec le temps. Crédits : NASA ASI/BeppoSAX

Quelques mois plus tard, le 8 mai 1997, GRB970508 un nouveau sursaut,  fut détecté et localisé en rayons X par BeppoSAX. La localisation précise du sursaut permit de pointer le télescope Keck de Hawaii dans sa direction. Grâce à sa durée et à l’émission rémanente, une analyse spectrale devenait possible, permettant de faire une estimation de distance avec la mesure du décalage vers le rouge (redshift), voir sur le même thème « outil de mesure ». Le décalage vers le rouge est une modification de la longueur d’onde d’un rayonnement dans l’espace, lorsque sa source s’éloigne par rapport à l’observateur (effet Doppler) : plus le décalage vers le rouge est élevé, plus l’objet est lointain. Pour la première fois, la distance d’un sursaut allait être calculée. Dans le cas du sursaut long GRB970508, le décalage vers le rouge calculé est de 0,835, ce qui équivaut à 6 milliards d’années-lumière ! L’hypothèse d’une origine extragalactique des sursauts était ainsi vérifiée. Il devenait clair, pour la communauté, qu’une meilleure compréhension des sursauts gamma passerait par la transmission rapide d’une localisation précise du sursaut à un réseau réactif de télescopes au sol.

Une collaboration entre le sol et l’espace

En octobre 2000 eut lieu le lancement de la mission HETE-2 (High Transient Explorer). L’une de ses particularités était d’embarquer un processeur à bord pour calculer la position du flash directement. Une fois les coordonnées établies, elles étaient envoyées sur Terre via un émetteur radio et réceptionnées grâce à un réseau de 15 antennes relais déployé à la surface du globe, sous la trace du satellite. Une stratégie qui permit notamment de découvrir la rémanence d’un sursaut court (GRB050709). Mis en orbite en 2002, le satellite européen INTEGRAL (INTErnational Gamma Ray Astrophysics Laboratory), appliqua la technique du masque codé pour la détection des sursauts gamma. Cette mission, toujours en opération, a découvert la polarisation de l’émission prompte des sursauts, renforçant le modèle de la boule de feu.

Le masque codé de l’imageur IBIS
Le masque codé de l’imageur IBIS (Imager on Board the INTEGRAL Satellite). Crédits : Integral Science Data Center, Université de Genève

L’un des deux télescopes robotiques TAROT (Télescope à Action Rapide pour les Objets Transitoires), précurseur dans l’observation optique automatisée. Celui-ci est installé sur le plateau de Calern dans le sud de la France, l’autre se trouve à La Silla au Chili.
L’un des deux télescopes robotiques TAROT (Télescope à Action Rapide pour les Objets Transitoires), précurseur dans l’observation optique automatisée. Celui-ci est installé sur le plateau de Calern dans le sud de la France, l’autre se trouve à La Silla au Chili.

L’ère de SWIFT

En 2004, un pas considérable fut franchi grâce au lancement du satellite de la NASA SWIFT, doté d’un télescope gamma grand champ et d’une caméra à rayons X très sensible. Autre particularité de cette mission, sa plateforme particulièrement agile permettant de s’orienter très rapidement dans la direction du sursaut dans le but d’étudier son émission rémanente. A titre d’exemple, SWIFT a détecté le 23 avril 2009 le sursaut gamma le plus éloigné à ce jour : GRB090423. Sa distance est estimée à 13 milliards d’années-lumière (redshift de 8,2) ce qui en fait l’un des objets les plus lointains jamais observés. Ce sursaut proviendrait de la mort d’une étoile massive qui aurait eu lieu 630 millions d’années après le Big Bang (pour rappel, le Big Bang a eu lieu il y a 13,7 milliards d’années). Cet évènement témoignerait des premiers âges de l’Univers.

Le système d’alerte de la mission SWIFT repose sur l’ombre portée à travers un masque codé. Les motifs du masque sont réalisés grâce à un algorithme. Crédits : NASA
Le système d’alerte de la mission SWIFT repose sur l’ombre portée à travers un masque codé. Les motifs du masque sont réalisés grâce à un algorithme. Crédits : NASA

Des réseaux de télescopes robotiques au sol furent mis en place pour suivre et étudier les alertes diffusées par le satellite SWIFT. Par exemple, le télescope TAROT a été spécifiquement conçu pour cibler le plus rapidement possible les objets transitoires. Le 4 septembre 2005, ce télescope permit d’étudier la lumière émise par le sursaut gamma GRB050904, qui a eu lieu alors que notre Univers était âgé de seulement 900 millions d’années, soit 7% de son âge actuel. Avec un miroir de seulement 25 cm de diamètre, TAROT a donc détecté un objet situé à 12,8 milliards d’années-lumière ce qui souligne le caractère très énergétique des sursauts gamma. La dernière mission en date, le satellite de la NASA Fermi envoyé en orbite en 2008, étend l’étude de l’émission prompte des sursauts à plus haute énergie. Fermi a notamment détecté GRB080916C, le sursaut gamma dont l’énergie libérée en fait l’explosion la plus violente jamais observée.

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Grâce à la possibilité d’observer les sursauts gamma dans le domaine de la lumière visible et infrarouge, on sait désormais qu’ils se produisent dans des galaxies très lointaines, si éloignées que certaines d’entre elles sont répertoriées comme les objets les plus distants mesurés aujourd’hui. Or, compte tenu de la vitesse finie de la lumière, regarder loin c’est remonter le temps et ainsi observer loin dans le passé ! Tels des phares éphémères du cosmos, les sursauts gamma permettent donc de sonder l’Univers aux différentes époques de son histoire et de mieux comprendre comment les galaxies se sont formées au cours du temps.

Toujours plus loin

Ces flashs sont des outils prometteurs pour sonder l’Univers jeune, son contenu et pouvoir ainsi étudier les étapes de son évolution. Par exemple, le sursaut le plus lointain identifié à ce jour, GRB090423, s’est produit 630 millions d’années après le Big Bang, lorsque l’Univers était encore dans sa prime jeunesse.

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Image infrarouge de la contrepartie du sursaut gamma GRB090423 obtenue avec le télescope GEMINI situé à Hawaii. Crédits : Gemini Observatory / NSF / AURA, D. Fox & A. Cucchiara (Penn State U.), and E. Berger (Harvard Univ.)

Ce sursaut long serait issu d’un « collapsar », explosion d’une étoile très massive qui s’est effondrée sur elle-même sous l’effet de son propre poids. Avec une masse d’au moins 20 à 30 fois celle du Soleil, cet astre rare pourrait faire partie des toutes premières générations d’étoiles. Ces étoiles, dites de “population III” seraient très massives, lumineuses et constituées seulement de quelques éléments légers (hydrogène, hélium). Elles auraient été formées à peine 400 millions d’années après le Big Bang mais on ignore encore comment. Leur durée de vie est courte, quelques millions d’années seulement. Elles sont supposées être en partie à l’origine des autres éléments formés au cours du temps et détectés aujourd’hui dans l’Univers proche. Les sursauts peuvent donc renseigner sur le milieu où ces étoiles sont nées. Ils contribuent ainsi à la compréhension de l’évolution stellaire dans l’Univers primordial.

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Vision d’artiste montrant l’incroyable luminosité des premières générations d’étoiles dans la galaxie CR7, située à 12,9 milliards d’années-lumière. Ces populations stellaires pourraient être en partie composées d’étoiles très massives dont certaines seraient à l’origine des sursauts gamma lointains. Crédits : ESO/M. Kornmesser

Par ailleurs, un autre aspect intéressant des sursauts gamma consiste à utiliser leur signal comme une lumière d’arrière-plan qui traverse successivement les régions situées entre le sursaut et la Terre. Ces milieux étant franchis à des distances donc à des époques différentes, les empreintes laissées sur la lumière du sursaut pourraient alors donner des indications sur la teneur en éléments de l’Univers au cours de son histoire.

Les sursauts gamma, un laboratoire de physique des conditions extrêmes

La débauche d’énergie du sursaut, la vitesse des particules éjectées et les successifs chocs avec le milieu environnant sont autant d’éléments qui permettent de classer les sursauts gamma parmi les laboratoires de physique des conditions extrêmes, dans bien des cas impossibles à reproduire sur Terre.
L’énergie des particules accélérées est des ordres de grandeur (jusqu’à un million) au-delà de ce que les plus puissantes machines terrestres comme le Large Hadron Collider (LHC) peuvent aujourd’hui produire. De ce fait, l’étude des processus physiques dans ces condition extrêmes permet de mieux comprendre les conditions régnant dans d’autres classes d’objets.
A titre d’exemple, citons la nature et l’énergie des particules propulsées dans des jets à des vitesses relativistes, phénomènes aussi évoqués pour expliquer l’origine des épisodes éruptifs observés dans les blazars, des galaxies actives abritant un trou noir supermassif de plusieurs millions de masse solaire.

Autre portée majeure des processus physiques en jeu, les sursauts gamma figurent parmi les sources prometteuses de neutrino et de rayonnement cosmique de très haute énergie.
Les étoiles extrêmement massives (centaines de masses solaires) sont selon plusieurs scénarios à l’origine d’une classe particulière de sursauts, les sursauts longs très lointains. L’étude du sursaut, conséquence de l’explosion de l’étoile, est un outil de choix pour mieux cerner la première génération d’étoiles (étoiles dites de population III) et la formation stellaire dans les premières phases de l’univers. Un autre aspect singulier des sursauts gamma, les sursauts courts, repose sur la possibilité qu’ils soient des sources d’ondes gravitationnelles. La coalescence de deux astres compacts (étoile à neutron et/ou trou noir) est un scénario probable pour expliquer cette émission. Néanmoins, les phases de la fusion ou le résidu de la coalescence sont encore mal compris. Une détection commune sursaut gamma – ondes gravitationnelles permettrait des avancées significatives.

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En 1997, un phénomène de rémanence associé à un sursaut gamma fut découvert par le satellite de l’ASI (l’Agence spatiale italienne) BeppoSAX. La rémanence correspond au prolongement de l’émission dans les domaines X, visibles et radio, juste après le bref flash gamma (l’émission prompte). Cette découverte fut capitale car elle permit de déterminer pour la toute première fois la distance d’un sursaut ainsi que les propriétés physiques de son environnement proche. Un champ de recherche nouveau s’ouvrait ainsi à la communauté scientifique.

Alors que l’émission prompte ne dure que quelques secondes, la rémanence du sursaut perdure quant à elle sur une période plus longue, heures ou jours suivant le domaine de longueurs d’onde. Ceci a une conséquence immédiate, elle peut être étudiée en détail dans le visible et infrarouge par les télescopes au sol à condition de disposer d’une position affinée de la source dans le ciel. Enjeu majeur à ce stade, les études en mode spectroscopique permettent de livrer des informations variées et diverses comme la distance, les propriétés de l’environnement du sursaut, le type de galaxie hôte, la nature des milieux traversés par la lumière durant son périple jusqu’à la Terre. La spectroscopie s’avère à ce stade un outil de mesure extrêmement puissant et indispensable pour utiliser les sursauts comme sondes de l’Univers lointain.

Les raies spectrales

Un spectromètre placé au foyer d’un télescope permet de décomposer la lumière de la source visée pour établir son spectre. Celui-ci est une véritable carte d’identité de l’objet étudié, son code barre en quelque sorte. Il est en effet caractérisé par la présence de raies spectrales, positionnés a des longueurs d’onde caractéristique des éléments chimiques de la source. En utilisant les informations d’un spectre, il est donc possible de déterminer la composition chimique de l’objet observé.

Raies spectrales
A gauche, le spectre continu d’une source de lumière. Au centre, la présence d’un nuage de gaz sur la ligne de visée fait apparaître des raies en absorption, car les éléments chimiques du nuage filtrent les photons à certaines longueurs d’onde caractéristiques du milieu absorbant. A droite, le spectre d’un gaz ionisé, caractérisé quant à lui par une raie en émission à une longueur d’onde particulière, propre de l’élément ionisé. (Crédit : The Pennsylvania State University)

Le décalage spectral, ou mesure de distance

La longueur d’onde d’une raie spectrale peut également traduire un mouvement de la source émettrice, selon l’effet Doppler. Si la source lumineuse se rapproche, sa longueur d’onde apparente devient plus courte, elle est décalée sur le spectre. Dans le domaine de la lumière visible, cela signifie qu’elle se décale vers le bleu. A l’inverse, quand la source s’éloigne, sa longueur d’onde apparente augmente. On parle de décalage vers le rouge ou redshift en anglais. Et plus la source se déplace rapidement, plus le décalage spectral est important. Cette propriété est particulièrement intéressante en astronomie, l’expansion de l’Univers conduisant de fait à un décalage vers le rouge du spectre des galaxies.

Redshift
Plus on s’éloigne de la Terre, plus le décalage vers le rouge des galaxies est important. Crédit: Space Exploratorium

L’importance de ce décalage vers le rouge est directement reliée à la distance de la source observée : plus l’objet est lointain, plus ce décalage est grand. C’est la loi communément appelée loi de Hubble (car découverte par Edwin Hubble en 1929) mais recommandée depuis octobre 2018 (suite à une résolution prise par l’Union Astronomique Internationale) pour être nommée loi de Hubble-Lemaître). Ainsi, chaque système absorbant traversé par un sursaut gamma produit dans le spectre de son émission rémanente des raies d’absorption. Le décalage en longueur d’onde de ces raies nous permet de mesurer alors la distance à la Terre du milieu à l’origine de l’absorption. En particulier, le tout premier absorbant rencontrée par la lumière du sursaut est le gaz présent dans son environnement proche au sein de sa galaxie et possède le décalage spectral le plus important car le plus lointain. Ceci est dans certains cas vérifié par l’observation de raies en émission de la galaxie hôte qui présentent le même décalage spectral.

Spectre
La spectroscopie permet de mettre en lumière le contenu chimique de la galaxie hôte du sursaut comme celui du milieu intergalactique situé sur la ligne de visée. Les figures ci-dessus montrent les spectres optiques de l’émission rémanente (à gauche) et de la galaxie-hôte (à droite) du sursaut GRB970805. Sur le spectre de gauche, obtenu trois jours après le sursaut, un système de raies en absorption est attribué par leur respectives positions (z=0.835) à des éléments chimiques (Fer et Magnésium) situés dans la galaxie hôte et cochés comme tel par un astérisque. Le spectre de droite de la galaxie hôte, obtenu une fois l’éclat du sursaut atténué (semaines ou mois après le flash initial) permet grâce à la position des raies en émission (ici oxygène et néon) de déterminer une distance (z=0.8349) remarquablement en accord avec la mesure précédente. (Crédits : Metzger et al. 1997, Nature et Bloom et al. 1998, ApJ)

Au-delà, de multiples diagnostics

La distance, mesurée par le décalage spectral des raies d’absorption, n’est pas la seule quantité physique obtenue à partir du spectre de l’émission rémanente des sursauts gamma. Ces raies nous apportent en effet une multitude d’informations sur la composition chimique des milieux absorbants traversés, et sur les propriétés physiques des galaxies dans lesquelles se produisent les sursauts. Par exemple, les abondances relatives des différents éléments chimiques observés dans les spectres, notamment celles des “métaux” comme le Fer, le Silicium ou le Zinc, nous renseignent sur l’état de l’enrichissement en éléments lourds dans le milieu interstellaire des galaxies. En fonction de leurs distances, les sursauts apportent donc des contraintes très fortes sur l’évolution de la métallicité au cours de l’histoire cosmique. Par ailleurs, le spectre des sursauts les plus lointains permet de comprendre comment l’hydrogène neutre dont était composé le milieu intergalactique après le Big Bang s’est progressivement ré-ionisé au cours du premier milliard d’années de l’Univers. La nature des sources à l’origine de cette ré-ionisation reste encore fortement débattue par les scientifiques aujourd’hui.

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L’avènement du spatial dans les années 60 a ouvert une nouvelle ère dans l’exploration de l’Univers. L’accès à l’espace permettait dorénavant d’accéder à des rayonnements impossibles à mesurer depuis le sol et de bénéficier de conditions d’observation particulières, par exemple en s’affranchissant de la turbulence atmosphérique.
La complémentarité sol-espace est rapidement apparue comme une nécessité pour le besoin d’une approche multi-longueurs d’onde des objets célestes visés. Aujourd’hui, tout projet scientifique spatial doit intégrer dans sa constitution une composante sol en particulier un soutien par des observatoires terrestres. La mise en œuvre d’observations couplant sol et espace est néanmoins soumise à plusieurs types de contraintes imposés par le mode de fonctionnement d’un satellite et la nature des opérations au sol.
SVOM est un satellite en orbite basse, placé à une altitude de 650 km. A cette altitude, le satellite effectue le tour de la Terre en un peu plus de 95 minutes soit 15 révolutions par jour. L’orbite est inclinée de 30° par rapport au plan équatorial terrestre. En conséquence, la trajectoire du satellite oscille entre les latitudes -30 et +30 degrés. Le choix des paramètres de l’orbite résulte d’un compromis entre le site de lancement, la puissance du lanceur (et son coût) et le système de stabilisation du satellite. La vidéo ci-dessous représente la trace au sol du satellite (en vert) sur plusieurs révolutions; on distingue aussi la zone jour et la zone nuit, crédit: CNES.

La première contrainte liée à l’orbite basse est d’assurer un contact permanent avec le satellite. Une solution consiste à déployer un réseau d’antennes sous sa trace. Le choix de l’inclinaison impose alors le nombre de stations. Dans le cas de SVOM et son inclinaison de 30 degrés, il est nécessaire de répartir judicieusement 47 antennes situées entre les latitudes -30° et +30°.
La seconde contrainte est imposée par la nécessité de maintenir le satellite et ses instruments dans des plages de températures adéquates. Une solution consiste à définir une face froide du satellite de façon à évacuer via des radiateurs les calories produites par les électroniques. Cette face froide doit être maintenue à plus de 90 degrés du Soleil. En conséquence, la moitié du ciel n’est pas observable à un moment donné.
La troisième contrainte liée à l’objectif scientifique de la mission SVOM est d’observer des zones du ciel accessibles à tout moment par un télescope au sol quand il fait nuit pour lui. Ceci implique que l’axe optique des instruments à bord du satellite pointe dans la direction opposée au Soleil. Cette stratégie a un prix car la Terre viendra occulter une fois par orbite le champ de vue des instruments, jusqu’à 50% de la période de révolution c’est-à-dire 45 minutes.
La quatrième contrainte est déterminée par l’accès indispensable aux grands télescopes au sol (VLT, Hawaii, La Palma). Pour bénéficier d’observations optimales, le ciel visé par les instruments à bord du satellite doit être proche du zénith de ces grands télescopes.

D’autres contraintes sont imposées par le contenu de notre galaxie, la Voie lactée. En effet, la galaxie abrite de très nombreuses sources transitoires en X et gamma à même de mimer un sursaut et d’induire en erreur la chaine de détection. De plus, si un sursaut est détecté à travers la Galaxie, son suivi au sol sera fortement affecté par l’absorption interstellaire. Enfin, la source Scorpius X-1 situé hors du plan galactique est extrêmement brillante dans le domaine étudié par SVOM. Afin de ne pas perturber les mesures, elle doit être évitée.
L’ensemble de ces contraintes fortement couplées entre elles a amené à définir la face froide du satellite, l’agencement des instruments à bord et la stratégie de pointage. Cette dernière est communément appelée « loi d’attitude ».

La Synergie Sol/Espace

L’étude des objets astronomiques demande nombre de ressources, notamment d’un point de vue matériel. Il faut pouvoir acquérir les données les plus précises qui soient, tout en lançant un satellite ayant la souplesse d’exécution nécessaire à l’observation de phénomènes transitoires. Le maître mot est optimisation. Pour répondre au mieux aux objectifs de la mission, la synergie entre les instruments embarqués et ceux présents sur Terre est capitale.

SVOM met ainsi en œuvre une séduisante combinaison d’instruments.

Étape 1 : Détecter et localiser
La détection a lieu dans l’espace car les rayons gamma sont arrêtés par l’atmosphère de la Terre. Cette tâche est dévolue au télescope ECLAIRs, dont le taux de détection est estimé à environ 80 par an , avec environ 20% d’événements très éloignés possédant un décalage vers le rouge supérieur à 6.
Une estimation de la position dans le ciel de l’événement est ensuite transmise en quelques dizaines de secondes à la communauté scientifique, transitant par le réseau d’alerte VHF, dont les antennes relais jalonnent la zone intertropicale.

Étape 2 : Observer l’émission prompte
Pendant le temps de localisation, le moniteur gamma GRM, sera capable de fournir une estimation du pic d’énergie (Epic ou Epeak en anglais) du sursaut. Le pic d’énergie est défini comme étant l’énergie à laquelle le sursaut rayonne le maximum d’énergie. Plusieurs études semblent indiquer une corrélation entre Epic et la luminosité absolue du sursaut. Sur Terre, les GWAC, télescopes grand angle, vont donner une observation de l’émission prompte dans le domaine visible.

Étape 3 : Augmenter la précision de la localisation pour activer le suivi
Après une manœuvre automatique de glissement du satellite en moins de 5 minutes, le MXT et le VT, complétés par les deux GFT au sol, vont assurer un suivi multi longueurs d’onde systématique pendant plusieurs heures. (Le VT va en particulier permettre la détection de près de 75% des sursauts gamma dans le domaine visible, et pour la première fois, d’explorer le domaine des sursauts sombres, sursauts pour lesquels la contrepartie optique n’est pas décelée.) Ainsi débute la recherche de la rémanence.

Étape 4 : Redistribuer l’alerte
Tous ces instruments s’inscrivent dans une cascade d’opérations permettant d’affiner la localisation de quelques minutes d’arc à quelques secondes d’arc. Les alertes seront ensuite redistribuées à la communauté scientifique en temps réel grâce au réseau d’alerte GCN ou ceux disponibles au moment du lancement.

Etape 5 : Déterminer la distance
En cas de bonne estimation de la position, les grands télescopes généralistes terrestres à plus petit champ de vision (tel que le VLT de l’ESO au Chili) permettront la réalisation d’un spectre. Il sera alors possible de mesurer le décalage vers le rouge afin d’estimer la distance de la source lumineuse.

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Manifestation d’une explosion gigantesque, ces flashs de lumière sont considérés comme les éléments les plus brillants et les plus riches en énergie depuis le Big Bang.

Un sursaut gamma s’accompagne d’un dégagement de matière sous forme de deux cônes opposés. https://www.eso.org/public/france/images/eso0917a/
Un sursaut gamma s’accompagne d’un dégagement de matière sous forme de deux cônes opposés. Crédit : ESO

Ce sont des événements rares à l’échelle d’une galaxie et pourtant il serait possible d’en observer en moyenne une dizaine par jour.
La puissance qui s’en dégage est considérable, équivalente à plus d’un milliard de milliards de soleils. Cette particularité les rend donc décelables à des distances très grandes, au-delà même de notre galaxie. Toutefois leur détection s’avère difficile. De véritables prouesses techniques sont nécessaires pour observer les sursauts gamma, aléatoires et imprévisibles.

Une bouffée de photons gamma

Ces explosions sont appelées “sursaut gamma” en référence aux particules de très haute énergie libérées initialement : les photons gamma. Tout comme la lumière visible, les rayons X ou encore les ondes radio, il s’agit d’une onde électromagnétique.

Les rayons gamma (?) sont les ondes de plus petites longueurs d’onde (?) du spectre élecromagnétique. Le spectre de la lumière visible, à titre indicatif, est représenté par les couleurs selon la longueur d’onde croissante.
Les rayons gamma sont les ondes de plus petites longueurs d’onde du spectre électromagnétique. Le spectre de la lumière visible, à titre indicatif, est représenté par les couleurs.

L’énergie d’un photon est mesurée en électron-volt (eV), un photon de lumière visible dégage environ 2eV. Celle d’un photon gamma peut atteindre plusieurs milliards d’électrons-volts !

Naissance d’un sursaut Gamma

L’explosion à l’origine du sursaut remplit des conditions spécifiques. Aujourd’hui, deux scénarios sont évoqués pour expliquer la puissance et la variation rapide des sursauts gamma : la coalescence ou fusion de deux objets compacts (étoile à neutron ou trou noir) et l’effondrement d’une étoile très massive.
La majorité des sursauts gamma recensés aujourd’hui indique qu’ils apparaissent à la mort d’une étoile très massive. En effet, dans le scénario de l’effondrement d’une étoile en fin de vie, celle-ci doit être très massive pour fournir l’énergie nécessaire à l’éjection de matière à très grande vitesse. C’est cette matière, lorsqu’elle se propage dans le milieu environnant, qui va permettre la transformation de cette énergie en radiations gamma.
Au moment de l’explosion, on distingue plusieurs étapes expliquant l’apparition du sursaut, selon le modèle dit de la “boule de feu” :

Illustration du modèle de la boule de feu. Crédit : NASA
Illustration du modèle de la boule de feu. Crédit : NASA

  1. Le progéniteur produit des jets de matière essentiellement constituée de paquets d’électrons, éjectés par à-coups dans une direction particulière. Ces paquets sont expulsés à des vitesses différentes mais toutes de très grande ampleur, proches de celle de la lumière. Ces jets sont dans ce cas appelés jets ultra-relativistes.
  2. Des chocs très violents ont lieu lorsque ces paquets d’électrons rentrent en contact : c’est le modèle des chocs internes. Les couches de matière expulsées à des vitesses différentes finissent par rentrer en collision, les couches les plus rapides rattrapant les plus lentes. Ces fronts de chocs vont engendrer de manière brusque des rayons gamma. C’est ce qu’on appelle l’émission prompte.
  3. Il y a également des chocs externes où ces mêmes couches de matière interagissent ultérieurement avec le milieu environnant du progéniteur. Ceci donne lieu à des rayonnements moins intenses, moins énergétiques et s’étalant dans le temps. On y retrouve des rayons X, de la lumière visible et des ondes radio. C’est l’émission rémanente.

Les conditions d’apparition

La durée du sursaut indique deux types d’origine possibles :

  • Lorsque la durée est de moins de 2 secondes, le sursaut est appelé sursaut court. Ce flash serait issu de la coalescence de deux objets massifs et compacts : des étoiles à neutrons, ou une étoile à neutron et un trou noir.
    Ces deux astres, en orbite, finissent par “tomber” l’un sur l’autre à mesure qu’ils perdent de l’énergie par émission d’ondes gravitationnelles. De cette rencontre ultime va naître un nouveau trou noir.
  • Dans le cas des sursauts longs, ceux dont la durée est supérieure à 2 secondes, il s’agit de la fin de vie d’une hypernova, un type de supernova particulier. Une hypernova est une étoile dont la masse est supérieure à 20 fois celle du soleil et qui subit un effondrement gravitationnel. Un trou noir se crée brusquement entraînant des ondes de chocs qui font exploser le reste de l’étoile et percent l’enveloppe stellaire : les couches externes sont violemment expulsées. C’est le modèle de la boule de feu.

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Dans les deux cas, le résidu formé (probablement un trou noir) grossit en avalant en quelques secondes la matière dans son entourage immédiat, s’accompagnant de la formation d’un disque d’accrétion épais qui tourne rapidement. Une partie de la matière, attirée par la force d’attraction du trou noir, est expulsée sous la forme de deux jets opposés dans l’axe de rotation du disque selon un mécanisme physique encore loin d’être compris.
Cette éjection à très forte vitesse engendre les chocs précédemment décrits et fait apparaître le sursaut gamma, résultat des chocs internes. Pour percevoir sa lumière il faut donc que l’observateur se trouve situé dans l’alignement de l’axe d’émission.

L’émission rémanente

L’émission rémanente d’un sursaut gamma est la phase qui suit l’émission prompte. Elle résulte selon le modèle de la boule de feu de chocs qui lors de leur expansion vont balayer le milieu environnant du progéniteur, générant des émissions à toutes les longueurs d’onde. Son étude permet ainsi de connaître la nature de l’environnement du progéniteur. L’émission rémanente est moins éphémère que l’émission prompte. Elle décroit progressivement sur une échelle de temps non de la seconde cette fois mais de l’heure, du jour ou du mois. Ceci permet de mener des programmes d’observation avec des télescopes au sol ou dans l’espace , à condition de disposer d’une position suffisamment précise du sursaut, notamment dans le domaine des rayons X et en lumière visible. Les informations fournies par l’émission rémanente sont capitales pour une meilleure compréhension du phénomène explosif et des conditions régnant dans l’environnement des étoiles responsables des sursauts gamma.

A gauche, Cliché obtenue le 3 avril 2003 de l’émission rémanente optique du sursaut apparu le 29 mars 2003. A droite, un mois plus tard, l’émission est toujours visible mais plus faible car elle décroit progressivement. Source : ESO.
A gauche, Cliché obtenu le 3 avril 2003 de l’émission rémanente en visible du sursaut apparu le 29 mars 2003. A droite, un mois plus tard, l’émission est toujours visible mais plus faible car elle décroit progressivement. Crédit : ESO

Nomenclature

GRB pour Gamma Ray Burst, sursaut gamma en anglais, suivi de la date de détection, aammjj.

Exemple : GRB 970508 correspond à un sursaut gamma détecté le 8 mai 1997.

Vidéo de la chaîne Youtube « Le Sense Of Wonder « 

Pour découvrir, autrement, le sujet qui nous passionne :

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Les objets variables et transitoires jouent depuis longtemps un rôle majeur dans l’astronomie comme l’attestent notamment les observations des astronomes chinois reportées il y a 4000 ans (Lire à ce sujet le sujet « Regard sur le passé : Ciel immuable et ciel transitoire »). Comètes, novae, étoiles variables, supernovae, sursauts gamma ou fusions d’objets compacts à l’origine de l’émission d’ondes gravitationnelles sont parmi les objets de ce ciel variable et transitoire, bien loin de la représentation classique d’un ciel immuable, statique.
L’essor et l’intérêt porté à l’observation du ciel transitoire sont intimement liés aux développements et progrès technologiques des outils de détection : capteurs plus sensibles donc des temps de pose plus courts, accès à des domaines de longueurs d’onde nouveaux, puissance accrue des moyens de stockage et de traitement de l’information, avènement de caméras grand champs montées sur des télescopes de plus en plus grands ou bien encore efficacité et interaction avec les alertes données par les outils du domaine émergeant des messagers non électromagnétiques.

Les objets du ciel variable et du ciel transitoire

La différence entre objet variable et objet transitoire peut se définir en partie sur le caractère largement imprédictible du phénomène et du point de vue observationnel sur la limite de détection de l’instrument, un objet variable restant à tout moment détectable tandis qu’une source transitoire tombe sous le seuil de détection. Dans les deux cas les échelles temporelles de variation peuvent être diverses. Un autre aspect marquant la différence entre les deux catégories relève de l’impact de la variabilité sur la nature même de l’objet. Une source peut être variable non par un changement intrinsèque de sa composition mais par un effet externe comme le transit d’une planète devant une étoile qui modifie pour l’observateur la luminosité de l’astre visé. Dans le cas d’une source transitoire, le changement d’état est suivi d’une transformation physique profonde du système causant dans certains cas (sursauts gamma ou supernova) la disparition de l’étoile hôte. L’étude du ciel transitoire permet ainsi de mieux comprendre des phénomènes comme les processus d’accrétion de matière dans les systèmes binaires, les éjections sous forme de jets dans les sursauts gamma, le comportement d’un plasma en présence de champs magnétique et gravitationnel intenses ou bien encore la fusion de deux astres compacts. Les objets transitoires peuvent appartenir à la Voie lactée ou être situés à des distances bien plus considérables comme les noyaux actifs de galaxies. Ils sont observés aujourd’hui à diverses longueurs d’onde.

La vidéo ci-dessus illustre le caractère extrêmement changeant du ciel lorsqu’observé dans certaines longueurs d’onde. La séquence résulte de l’observation continue de la voûte céleste (représenté ici en coordonnées galactiques) par l’instrument ASM de la mission spatiale RXTE dans le domaine des rayons X (entre 5 et 12 keV) durant la période 1996-1999, soit 4 années de données. Des sources apparaissent soudainement ou changent subitement d’éclat. Elles sont principalement réparties le long du plan galactique (figure en bas) et pour les plus remarquables leur identification est indiquée. Crédit : http://xte.mit.edu/.

Le ciel transitoire et la mission SVOM : stratégie et programme d’observation

Si le cœur de la mission SVOM est de garantir l’observation d’environ cent sursauts gamma par an, c’est aussi un formidable outil destiné à sonder le ciel transitoire. Pour observer des phénomènes se produisant sur de courtes échelles de temps (parfois inférieure à la seconde), d’importants dispositifs de détection et de suivi sont nécessaires. Comme sa mission sœur SWIFT, développée par la NASA, la mission SVOM laisse dans son programme d’observation une place importante pour la science hors sursaut. SVOM sera en mesure de déclencher une alerte suite à la détection d’un phénomène transitoire et ce grâce en particulier à ses instruments grand champs Eclairs et GRM. Réciproquement, la mission pourra réagir à des alertes (des cibles d’opportunité, ToO) générées par d’autres observatoires du ciel transitoire, au sol ou dans l’espace, et pointer alors ses instruments vers l’objet. SVOM sera ainsi un partenaire de choix pour d’autres programmes d’observation notamment dédié à l’étude du ciel transitoire, comme par exemple le projet LSST dans le domaine visible ou par le réseau SKA dans les ondes radio.

Astronomie multi-messagers

La mission sera également à même de répondre rapidement aux alertes fournies par les télescopes à neutrinos IceCube ou KM3N ou par celles délivrées par les interféromètres d’ondes gravitationnelles LIGO et Virgo.

L’objectif initial de la mission, l’étude des sursauts gamma, pourra ainsi s’étendre à celle des ondes gravitationnelles. Prédites depuis Einstein et la théorie de la relativité générale, ces oscillations de la courbure de l’espace-temps sont devenues réalité après l’annonce le 11 février 2016 de leur découverte par la collaboration LIGO/Virgo, couronnant des années de recherche et de développements technologiques. Le signal détecté le 14 septembre 2015 par les deux interféromètres du projet LIGO est interprété comme la signature des tout derniers instants de la fusion de deux trous noirs de chacun trente masses solaires. Ce même réseau d’interféromètres détecte le 17 août 2017 un autre évènement mais qui cette fois est accompagné d’une brève émission gamma capté par les satellites haute énergie Integral de l’ESA et Fermi de la NASA. Ici, le phénomène observé à la fois sous forme d’ondes gravitationnelles et électromagnétiques correspond à la fusion de deux étoiles à neutron, hypothèse longtemps avancée pour expliquer les sursauts gamma courts.

Ces découvertes majeures valident le scénario de coalescence de deux objets compacts (étoile à neutron et/ou trou noir) comme source d’émission d’ondes gravitationnelles et ouvrent de nouveaux horizons par exemple leur utilisation comme potentielle sonde cosmologique.

L’astronomie des neutrinos est autre domaine multi-messager où la mission SVOM peut apporter une contribution significative en recherchant dans ce cas la contrepartie électromagnétique du signal neutrino, premier pas vers l’identification des sources.

Les défis du domaine temporel

L’étude du ciel transitoire est une branche de l’astronomie en pleine essor et de nombreux observatoires aujourd’hui en développement et dédiés à cette thématique verront le jour à l’horizon 2020. Devant ce panorama, la communauté scientifique fait face à de nombreux défis. Le principal enjeu est le traitement de l’information en temps réel pour détecter au plus vite les phénomènes transitoires et diffuser les alertes de manière efficace. La masse conséquente de données et le nombre d’acteurs nécessitent également une organisation spécifique pour assurer efficacement la diffusion et le suivi des alertes, tâche et défi que les scientifiques du projet préparent activement.
Le programme d’observation de SVOM sera constitué à 25% pour la recherche des sursauts gamma, tandis que 15% seront dévolus aux phénomènes transitoires (hors sursaut) les deux premières années pour atteindre 40% la troisième année.

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